Une vache et son veau dévorés vivants par des vautours dans les Pyrénées. Face à la multiplication des attaques, les éleveurs dénoncent le déni des autorités.
Ils étaient plus de deux cents. Deux cents oiseaux de plus de deux mètres d’envergure, massés à quelques dizaines de mètres d’une ferme des Pyrénées, pour déchiqueter un veau encore tiède et sa mère à peine agonisante. Ce n’est pas une scène de documentaire animalier, c’est le quotidien de Pierre Coumes, éleveur à Bescat, dans les Pyrénées-Atlantiques. Le 23 avril dernier, une attaque d’une violence rare a frappé son troupeau : un veau tout juste né, une vache primipare, et des vautours qui ne se sont pas fait prier pour entamer les chairs encore vivantes.
Le silence de l’État et la gêne des experts
Officiellement, le vautour fauve est un charognard. Officieusement, il est de plus en plus souvent prédateur. Mais ce que savent les éleveurs et ce que reconnaît l’administration, il y a là un gouffre — ou plutôt un abîme d’hypocrisie. Car dès que l’on parle d’attaque « ante-mortem », les experts de bureau, à Paris ou ailleurs, se crispent. Trop compliqué à prouver. Trop gênant à admettre. Et puis, comment accuser un oiseau protégé, totem vivant des équilibres écologiques rêvés ?
Pourtant, les témoignages s’accumulent. Cela fait vingt ans que les éleveurs des vallées pyrénéennes dénoncent ces attaques. Le technicien Jean-Yves Arribe, de l’Institution patrimoniale du Haut-Béarn, les recense avec constance : plus de 500 cas en deux décennies, dans les seuls Pyrénées-Atlantiques. Et encore, il s’agit d’un chiffre « certainement sous-estimé », tant la majorité des éleveurs se découragent à signaler des faits systématiquement minimisés.
Quand l’écologie devient dogmatique
Cette nouvelle attaque pose une question brutale : que vaut la vie d’un veau ou d’une vache face au dogme écologique ? Car c’est bien cela qui est en jeu. Le vautour est protégé, il est le symbole d’une nature qu’on voudrait sauvage et épurée, vidée de l’homme et de ses troupeaux. Le berger devient l’intrus, et la victime, une variable d’ajustement dans un récit réécrit à coups de subventions Natura 2000.
Pierre Coumes avait tout prévu : système de détection du vêlage, surveillance rapprochée, exploitation modernisée. Il s’absente une demi-heure, et c’est la curée. À son retour, la vache est encore en vie. Le quad ne fait pas fuir les oiseaux. Il filme la scène. Il témoigne. Et malgré cela, rien ne garantit qu’il sera indemnisé.
Il y a deux ans, il avait déjà subi une attaque. On lui avait reproché de ne pas avoir de preuve. Cette fois, il en a. Mais on continue à chipoter.
Le prédateur sous protection
Depuis vingt ans, les effectifs de vautours ont triplé dans les Pyrénées françaises. On en compte aujourd’hui 1 220 couples reproducteurs. Dans une nature de plus en plus sous pression, où les charognes naturelles se font rares, il ne faut pas être éthologue pour comprendre qu’un oiseau affamé passe du cadavre au vivant. C’est un simple ajustement de stratégie, une réponse opportuniste à la surpopulation.
Mais le discours officiel, lui, reste figé. On ne peut pas accuser ce que l’on a sanctuarisé. Alors on accuse les éleveurs de négligence, ou d’invention. On leur explique que ce qu’ils ont vu n’est pas ce qu’ils ont vu. Que la vache soufflante, les coups de bec, les entrailles ouvertes, ce n’est pas une attaque, c’est un « acte de charognage très proche de l’instant de la mort ».
Une réforme indispensable de la reconnaissance des attaques
Il est temps de revoir les protocoles. Il est temps de prendre au sérieux les éleveurs. De créer un cadre d’expertise indépendant, capable de constater rapidement les faits, avec la présomption de bonne foi en faveur de ceux qui vivent auprès de leurs bêtes. Car ces gens-là n’inventent pas la terreur. Ils la voient, la filment, la vivent.
Et surtout, il est temps d’ouvrir les yeux sur la logique folle de certaines politiques de conservation qui ne veulent voir que des écosystèmes idéalisés, au mépris des humains qui les habitent.
Les vautours ont changé de régime. Les autorités, elles, continuent de brasser du vent.
A voir aussi en vidéo :
Chez nous en Drôme / Ardèche nous avons le même problème , les vautours se multiplient mais on semble oublier que le Vercors n’est pas Yellow Stone , que les charognes naturelles sont très rares et ne suffisent pas à nourrir toute cette population de vautours . J’ai vu des vidéos de vautours percutant des chamois sur les rochers et s’en repaitre en bas des falaises . Ce comportement de prédateur va devenir de plus en plus la norme et se transformer en une sorte d’évolution qui changera le mode de vie de ces oiseaux , et quand ce sera le cas , il y aura des carnages chaque jours , peu-être plus qu’avec les loups .Certains me prendront pour un parano , mais je pense que l’avenir me donnera raison .
Il ne fera pas bon de faire une chute pendant une randonnée. Le secours arriveront trop tard.