Protégés de 2000 à 2023, les sangliers en Chine prolifèrent et ravagent tout sur leur passage. Les chasseurs, devenus des stars des réseaux sociaux, endossent un rôle crucial face à une crise provoquée par des décennies d’inaction.
Dans les montagnes glaciales de Qinling, au nord de la Chine, un groupe de chasseurs avance en silence sur une pente escarpée. Armés de lances et de couteaux, accompagnés de chiens, ils traquent les sangliers, devenus un véritable fléau pour les populations rurales. Pourtant, ces animaux étaient considérés comme une espèce protégée en Chine jusqu’en 2023, un statut qui a largement contribué à la situation actuelle.
Des sangliers protégés pendant plus de deux décennies
Entre 2000 et 2023, les sangliers ont bénéficié d’un statut d’espèce protégée en Chine. Ce classement, initialement motivé par des efforts pour préserver la biodiversité et restaurer les écosystèmes forestiers, a permis à ces animaux de proliférer de manière incontrôlée. Leur population, estimée à plus de deux millions aujourd’hui, a explosé en l’absence de prédateurs naturels, comme les tigres ou les léopards, qui se sont progressivement raréfiés.
Mais à quel prix ? En 2024, ces sangliers ont causé au moins deux décès et de nombreux blessés. Les agriculteurs locaux, eux, subissent des pertes considérables, leurs champs ravagés en une nuit par des bêtes pouvant peser jusqu’à 150 kg. Pour des villageois comme Wang Aiwa, le bilan est lourd : « Parfois, je veille toute la nuit avec un bâton, mais cela ne sert à rien », explique-t-elle, en montrant son champ dévasté.
Des chasseurs en première ligne
Face à cette crise, les chasseurs comme les « City Hunters » se mobilisent. Ce groupe, basé à Weinan dans la province du Shaanxi, a abattu une centaine de sangliers en 2024. Leur efficacité repose sur l’utilisation de drones équipés de caméras infrarouges pour repérer les animaux et sur leurs chiens dressés pour la chasse.
Mais leur mission ne s’arrête pas là. Avec plus de 260 000 abonnés sur Douyin, la version chinoise de TikTok, les « City Hunters » ont transformé leur activité en un spectacle viral, accumulant des millions de vues. Cette popularité suscite autant d’admiration que de critiques. Les défenseurs des animaux dénoncent la cruauté de ces pratiques, tandis que les chasseurs, eux, rappellent que les sangliers ont coûté des vies humaines et des moyens de subsistance.
Les vraies responsabilités : une protection excessive
La véritable question demeure : qui est responsable de cette crise ? Les chasseurs, qui interviennent aujourd’hui pour limiter les dégâts, ou les décideurs qui ont maintenu les sangliers sous protection pendant 23 ans ? Ce classement a permis à l’espèce de se développer au-delà de toute maîtrise. Pour Liu Duo, responsable de WWF Chine, la disparition des prédateurs naturels et la restauration des forêts ont exacerbé la situation.
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Ce problème met en lumière une réalité souvent ignorée par les opposants à la chasse : l’absence de régulation d’une population animale entraîne des conséquences écologiques et humaines désastreuses. Les sangliers, bien qu’essentiels pour l’écosystème, ne peuvent proliférer sans contrôle, surtout dans un pays où leur habitat et leurs prédateurs naturels sont perturbés.
Entre nécessité et polémique
Malgré les critiques, les chasseurs comme Zhang Tengfei, leader des « City Hunters », persistent : « Les sangliers sont des nuisibles. Nous faisons un travail nécessaire pour protéger les agriculteurs. » La Chine réglemente strictement l’usage des armes à feu, rendant l’utilisation des chiens indispensable. De plus, Zhang rappelle que d’autres méthodes, comme les pièges, infligent des blessures inutiles à d’autres espèces.
Le gouvernement local, conscient de la gravité de la situation, encourage ces efforts en offrant des primes pouvant atteindre 3 000 yuans (397 euros) par animal abattu. Cependant, même avec ces incitations, les chasseurs ne peuvent à eux seuls résoudre le problème. Pour eux, l’objectif est clair : sensibiliser à la régulation faunique et attirer des revenus publicitaires pour couvrir les coûts croissants de leur activité.
Leçon à tirer : réguler pour préserver
La crise des sangliers en Chine est une démonstration éclatante des risques liés à une protection excessive sans régulation adaptée. Entre 2000 et 2023, cette politique a créé un déséquilibre majeur, qui aurait pu être évité par des actions de contrôle mesurées. Aujourd’hui, les chasseurs paient les frais d’une gestion inadéquate, tout en endossant le rôle de boucs émissaires pour ceux qui refusent de voir la réalité.
Alors, à ceux qui accusent la chasse d’être responsable des surpopulations, il est temps de poser la vraie question : que se passe-t-il quand on interdit toute régulation pendant plus de deux décennies ?
A voir en vidéo :
Je pensais que la nature se régulait seule. Allez dire ça aux agriculteurs des campagnes chinoises en espérant que ces sangliers ne viennent pas de France. J’imagine du tissus bas de gamme contre des containers de sangliers… c’est bien connu, les sangliers sont nombreux à être lâchés par les chasseurs.
Sacré hypothèse Serge, des sangliers de France en chine??? Et pourquoi pas des sangliers polonais, turcs, canadiens, marocains,… ???
Comme le dit souvent Richard , le problème est mondial , en voilà encore la preuve .