Sur les routes sinueuses des gorges de l’Aveyron, nous sommes partis en compagnie de l’ancienne gloire du cyclisme français Didier Rous et deux de ses amis à la poursuite de la bécasse. Une bouffée d’oxygène que le directeur sportif de l’équipe B&B Hotels p/b KTM s’accorde chaque saison sur ses terres natales afin d’échapper un moment à une vie professionnelle qui ne lui offre aucun répit.
Texte : Jérôme Meilliere / Photos : Bruno Bade & Jérôme Meilliere
La fin de saison cynégétique approche. Février est synonyme de clap de fin pour les amateurs de la mordorée. Après un premier rendez-vous tombé à l’eau (sans mauvais jeu de mots), c’est au début de cet ultime mois de chasse que nous répondons à l’invitation de Didier Rous. Ancien champion cycliste professionnel de renom (voir encadré), le sportif n’a jamais laissé sa passion de côté même au plus fort de sa carrière professionnelle. La chasse est sa bulle de décompression et fait partie intégrante de son équilibre quotidien. Toujours dans le milieu du cyclisme avec un rôle de directeur sportif d’une importante équipe française, il ne déroge pas à la règle et continue dès que possible à prendre la route de son proche Tarn-et-Garonne natal à la rencontre des belles demoiselles au long bec.
C’est plus précisément à cheval entre Tarn et Tarn-et-Garonne que le trio Pascal, Christophe et Didier se retrouve. Amis de longue date, Didier et Pascal se sont rencontrés lors du passage au professionnalisme du champion. Il était mécanicien et chasseur. Le rapprochement s’est donc fait naturellement. Christophe également passionné de cyclisme et de chasse est boucher charcutier de son état. Il a rejoint le duo depuis une dizaine d’années et arpente depuis avec lui le biotope très exigeant de gorges vertigineuses et de causses.
Un terrain de jeu grandiose
C’est sous une pluie fine et ininterrompue que se déroule la première étape de notre découverte. Après un café et quelques viennoiseries qui rempliront nos estomacs pour la journée, le temps est venu de se préparer. Il n’y aura pas d’entractes, les trois compères chassent d’une traite. Il n’est pas tout à fait 10 heures quand nous arrivons sur le lieu de ce premier acte. La sauvagerie des lieux donne l’impressionne d’être au milieu de nulle part.
Nous sommes sur les terres de Saint-Antonin-Noble-Val, village classé « Grands Sites d’Occitanie ». Ce vaste territoire de plusieurs milliers d’hectares offre un terrain de jeu grandiose. Ici il n’y a pas de routes, pas d’habitations.
C’est le rêve pour nos chasseurs et leurs compagnons à quatre pattes. Si Didier a eu l’opportunité de promener ses guêtres dans de nombreuses contrées pour y chasser la belle au long-bec, ici c’est son pays. Le plus beau à ses yeux. Et on peut le comprendre. C’est sur ces plateaux qu’il a commencé à chasser en famille, tout d’abord le lièvre avec des ariégeois. Les chiens ont toujours été présents dans son entourage proche. D’ailleurs pour l’ancien champion de France de cyclisme sur route : « sans chiens, pas de chasse. C’est inconcevable ».
Pour cette première journée humide, les trois amis sont accompagnés de la setter Osaka et des deux pointers Passion et Rebelle. Une équipe très jeune. Rebelle, 6 mois, effectue ses premiers pas en cette fin de saison. Certains diront que c’est trop tôt mais ces sorties auront pour but d’aiguiser sa curiosité et de prendre ses marques avec ses grandes « sœurs ». Pour Passion, qui n’est pour l’instant sortie que sur du terrain relativement plat et plus ouvert, c’est aussi le moyen de découvrir un nouveau territoire qui peut sembler difficile pour cette race à poil ras qui préfère des quêtes amples et « roulantes ».
Ici, l’environnement est cassant, très fermé et abrasif. L’oiseau se mérite. La plus expérimentée du jour est Osaka, 3 ans. Quelques coups durs durant cette saison ont forcé Didier et ses amis à miser sur la jeunesse.
Dans tous les cas, le cycliste ne se focalise pas : « Elles sont jeunes mais ne pas les faire chasser avec de vieux chiens ne m’inquiète pas, au contraire. Elles n’ont pas de concurrence, s’il y a des oiseaux elles auront tout le temps nécessaire de les trouver. Un chien avec de la bouteille peut mettre un frein à leur initiative, en « ramassant » les oiseaux sur un secteur qu’il connait déjà parfaitement ». Les sonnailles autour du cou posées et les hommes imperméabilisés, nous voilà partis. Osaka est équipée d’un biper, une technologie bien utile dans ce genre de tènement.
Didier aime à comparer ses chiens à des sportifs de haut niveau. « Nous laissons énormément d’initiative à nos auxiliaires. Même avec des sujets jeunes, voire très jeunes. Je ne suis pas pour les amener sur les places connues et je n’aime pas les avoir dans les pieds. Ici il faut qu’ils arrivent à trouver les bécasses seuls. Malgré certaines parcelles inaccessibles, j’apprécie les efforts fournis pour aller arrêter les oiseaux dans des remises souvent stupéfiantes. Nous ne les bridons pas et le biper est un précieux allié. Même si nos chances de réussite sont infimes par rapport aux nombres d’oiseaux arrêtés ».
Quelques allers-retours tambour battant pour se dégourdir les pattes et après s’être vidées, Osaka et ses copines s’engagent sans sommation dans une première coupe où s’entremêlent jeunes pousses de conifères, buissons noirs et épais ronciers. Après seulement quelques minutes, la sonnerie du biper se fait déjà entendre. Osaka est immobile. Le temps d’arriver l’oiseau s’est volatilisé. Le miroir déposé en guise de carte de visite ne laisse planer aucun doute, la belle était bien là, furtive. Le ton est donné, ces oiseaux de fin de saison ne se laisseront pas approcher facilement. Qu’importe, le but étant que les chiens trouvent. Comme le rappelle Didier : « le prélèvement est vraiment anecdotique, je ne chasse pas pour ça ! ».
La progression sur cette parcelle se fait lentement mais sûrement grâce aux passages ouverts par les nombreux cervidés. Sans la présence de ces grandes pattes, il serait quasiment impossible de pénétrer dans cette jungle locale. La journée avance et le paysage change.
La pluie est toujours présente quand nous abordons un secteur plus pentu. Un slalom entre des squelettes de buis recouvert de mousse s’improvise. Un décor de forêt enchantée. Comme partout ici, les buis ont subi l’assaut de la pyrale. Ce papillon blanc destructeur a mis à nu ces arbustes d’ordinaires vêtus de belles feuilles vertes quelle que soit la saison.
Les campanes retentissent sans discontinuer. La petite Rebelle n’a pas froid aux yeux. Souvent aux basques de Passion, elle montre déjà de belles attitudes et ne rechigne pas devant les nombreux obstacles. La météo ne lui facilite pourtant pas la tâche. Le difficile apprentissage se poursuit. Toujours accompagnés par cette équipe benjamine, les trois amis continuent d’arpenter ce terrain qui exige un minimum de condition physique. Malgré cet oiseau rapidement arrêté, les jeunes auxiliaires n’ont pas eu de nouvelles pistes à exploiter. Le beeper reste muet et les sonnailles tournent toujours à plein régime. Alors que nous sommes dans la deuxième partie de la boucle, nous entrons dans une veine profonde où la belle des bois aime se remiser.
L’OVNI (Oiseau Volant Non Identifié) était bien une bécasse
Sur un des versants de cette entaille creusée dans le sol calcaire, la sonnerie du beeper émet enfin ses premiers sons depuis cet arrêt précoce à la sortie des voitures. Osaka est figée devant un genévrier. Didier est prêt à ses côtés, Christophe plus haut et Pascal en face forment un large étau. La setter coule sur une courte distance, mais rien ne se passe. Puis, elle s’affole de nouveau. Cependant un doute subsiste. Au travers de l’épaisse végétation, il me semblait avoir aperçu une ombre passer dans les branches juste avant que la chienne ne fasse résonner son collier.
La direction pris par cet OVNI ne laisse aucun doute. Pensant au départ à une grive ou un merle, il faut se rendre à l’évidence… C’était une sorcière et elle ne nous a pas attendu.
Pascal préconise de remonter la veine jusqu’à sa pointe. La pluie redouble. Le substrat calcaire caillouteux n’empêche pas les buis, chênes, genévriers ou autres houx de s’entremêler et d’offrir à notre oiseau un lieu de remise idéal. Ce joli décor qui semble plaire aux oiseaux. Tout à coup la cloche laisse place à l’électronique. L’attitude d’Osaka ne ment pas. Cette fois Scolopax rusticola est là, bloquée.
Le triangle formé par nos trois chasseurs lui est fatidique. Forcée à prendre son envol, elle est cueillie avant d’atteindre la cime des arbres. Une Osaka coriace a réussi à dompter cette mordorée qui a cru jusqu’au bout à la possibilité d’entrevoir le 20 février saine et sauve. Elle a été vaincue quasiment sur la ligne d’arrivée. Pascal marque la belle comme le veut la réglementation. Il est maintenant temps de rentrer. La pluie aura eu raison de l’appareil photo.
Une semaine pour faire sécher le matériel avant de prendre le départ de la deuxième étape.
Nôtre deuxième acte s’annonce avec un changement radical concernant la météo. Le soleil est enfin revenu, le ciel est d’un bleu éclatant. Nous sommes le 15 février et la fermeture approche à grands pas.
Entre deux courses, Didier revient donc pour sa dernière sortie de la saison cynégétique en compagnie de Christophe et Pascal mais avec deux setters de plus. À Rebelle, Passion et Osaka, s’ajoute donc Osis et Gohan. Ce dernier est un vieux briscard auquel sera offerte la retraite après cette belle journée. Dans ces contrées, la longévité de la carrière des auxiliaires canins est souvent mise à mal car le biotope ne leur laisse guère de répit.
Après des dizaines et des dizaines d’oiseaux arrêtés, Gohan méritera de couler des jours tranquilles sur le causse tarnais. Osis revient sur le devant de la scène après une petite semaine de repos. Un problème cardiaque contraint à préserver le cœur de cette jeune setter. Malgré sa fougue, Osis ne sort pas autant qu’elle le souhaiterait, mais aujourd’hui, c’est fête !
Une belle boucle est prévue au programme à travers des paysages magnifiques et diversifiés. Nous allons commencer par un plateau où poussent quelques sapins avec à leurs pieds une végétation dense et piquante. Les chiens n’ont pas attendu le feu vert pour se lancer à la recherche des derniers oiseaux de la saison. La météo est douce. Malgré les pluies diluviennes qui se sont abattues depuis plusieurs semaines sur l’ensemble du sud-ouest de la France, tout a déjà vite séché. Le soleil enfin revenu et le vent ont juste laissé quelques flaques sur les chemins argileux. Le contraste est saisissant par rapport à notre première journée. Les chiens ont maintenant pris possession des lieux.
Les sonnailles résonnent ici et là. Osis et Osaka prospectent à un rythme soutenu. Les allers et venus prennent de l’ampleur. Même s’il est difficile de poser les yeux et de suivre l’évolution de ces infatigables auxiliaires, Didier se régale toujours autant de leurs prises d’initiatives dans un biotope qui pourrait en rebuter plus d’un : « Je pourrais sortir sans arme, mon vrai plaisir est là. Observer leurs comportements dans ce milieu si compliqué est sans aucun doute le meilleur moment de la chasse. Évidemment, un prélèvement de temps en temps pour les récompenser est nécessaire mais ma vraie et seule satisfaction est de les voir remonter et démêler une piste. L’arrêt ferme puis la récolte d’un oiseau, c’est la cerise sur le gâteau ».
Pas de tir sans arrêt
Après ces quelques éloges, nous continuons à progresser dans le labyrinthe végétal qui semble sans issue. Tout à coup, un oiseau passe juste au-dessus des têtes tel un papillon. Nous percevons le bruit sourd de ses battements d’ailes. Une scène qui nous a paru se jouer au ralenti, et pourtant. Les fusils sont restés sagement ouverts sur les épaules. Hors de question de tirer un oiseau non arrêté. Nous voilà prévenus, à une semaine de la fermeture les demoiselles sont méfiantes et vont user d’un grand panel de subtilités pour éviter de se faire cueillir juste avant la flamme rouge.
Les chiens redoublent d’activité, apparemment plusieurs mordorées sont présentes. Le beeper nous met en alerte à diverses reprises. Mais à l’approche de la source sonore les cloches traditionnelles remplacent le sonnaillon électronique, signe que les belles ont pris la tangente. Mais se frayer un chemin sans affoler tout le monde est un exercice insurmontable. Il faudra que les bécasses soient complètement cadenassées pour avoir l’espoir d’approcher et surtout de se placer dans de bonnes conditions. À la végétation dense s’ajoute maintenant un relief en dent de scie. Juste avant de se lancer dans la prospection d’une veine abrupte creusée dans la roche, une fuyarde est décrochée après avoir fait s’employer pleinement les chiens. Passion est fière de rapporter cette belle qui était remisée dans des couverts d’épines noires, pas très hauts mais inextricables. Nous nous se lançons maintenant dans les pentes qui jouxtent les gorges de l’Aveyron. Le sol est recouvert d’un amas de roches calcaires. La flore se fait plus clairsemée. L’impression de changer de région en quelques mètres. Quelques arbustes et buissons dénudés sont posés sur de grands éboulis caillouteux tandis que des bandes de conifères donnent un peu de couleur au tableau.
« Évidemment, un prélèvement de temps en temps pour les récompenser est nécessaire mais ma vraie et seule satisfaction est de les voir remonter et démêler une piste. L’arrêt ferme puis la récolte d’un oiseau, c’est la cerise sur le gâteau. »
Oiseau déroutant et fascinant
La difficulté du terrain n’enlève rien à la motivation du quintet setter-pointer. De vrais chiens tout-terrain. Un des beepers nous prévient que de toute évidence la bécasse se plait également dans cet environnement. A peine le temps d’arriver qu’une silhouette fantomatique passe en crête. Encore une fois, il est trop tard. Elle s’est dirigée vers le « roc pointu » qui surplombe les gorges. Nous ne la reverrons pas. Nous passons d’un versant à un autre. Ce dernier est plus exposé au soleil. L’atmosphère y est sèche et aride. Mais pourquoi pas, cette chasse n’en finit pas de nous surprendre. Alors que les chiens ne baissent pas de régime, Scolopax rusticola déjoue encore nos plans. Une fois de plus, juste elle passe au-dessus des têtes. Cet oiseau est totalement déroutant et fascinant. Passion n’a pas pu bloquer cette bécasse qui avait trouvé refuge sur une plage de cailloux. Qu’importe, Osis et Osaka qui ont vu la scène sont déjà en quête de retrouvailles sur le versant opposé ombragé. Les actions s’enchainent sans temps morts. Sur quelques portions, le pourcentage de ces pentes est parfois affolant. Les deux « O » pourraient prétendre au collier à pois rouge de meilleur grimpeur. Mais une autre compétition se déroule sous nos yeux. Qui arrivera à remettre la truffe sur cette volubile sorcière ?
Tout le monde se fait surprendre
Osaka se statufie de nouveau mais Passion passe devant et coule au bord du chemin qui remonte sur le causse. Didier se tient prêt sur ce sentier qui forme un virage. Christophe et Pascal ont de leur côté de la peine à arriver sur Osaka. Une nouvelle fois, toute l’équipe se fait surprendre. Si Passion avait devancé la plus expérimentée Osaka ce n’était pas un excès de précipitation ou un trop plein d’énergie. En effet, la bécasse avait trompé la vigilance de la setter et s’est retrouvée pressée par la fougue encore mal gérée de cette toute jeune pointer.
Didier peste de ne pas avoir fait suffisamment confiance à la jeunesse. C’est sur cet « échec » que les trois amis décident de rentrer tranquillement. Il fait chaud, les vieilles pattes de Gohan ont du mal à remonter la pente et il faut penser au cœur d’Osis.
La journée fut belle. Des oiseaux pleins de facéties, des chiens passionnés et des chasseurs toujours heureux de partager ces bons moments dans des paysages qu’ils ne quitteraient pour rien au monde. Didier Rous a parcouru le globe lors de sa vie de cycliste professionnel et ces terres ont toujours été sa bulle de respiration.
Même si son quotidien tourne toujours autour de la Petite Reine et l’écarte régulièrement de ses bases, il revient toujours à ses sources. Il demeure sous le charme de cette nature restée sauvage où l’humain n’a pas d’emprise. Tout le monde n’a pas cette chance, Didier en a conscience. Pour ma part, je me considère comme un privilégié d’avoir passé ces deux journées en compagnie d’hommes passionnés sur un territoire aussi grandiose.
Si Didier Rous aime à voir ses chiens remonter les émanations bécassières, sa vie de cycliste professionnel lui a donné l’occasion de monter sur divers podiums de courses prestigieuses. Son caractère combatif et son talent lui ont permis de se forger un palmarès qui en ferait pâlir plus d’un. Ses 13 participations au Tour de France suffisent à résumer sa longue et riche carrière. Mais ses deux plus grands coups d’éclats restent ses deux titres de champion de France récoltés en 2001 et 2003. Sacré dans le Morbihan en 2003, il réalisera ce jour-là l’exploit de finir seul après 80 kilomètres en solitaire. Même son dauphin du jour Richard Virenque n’y pourra rien. Didier a récolté également bon nombre de victoires dans les courses à étapes (dont une sur la Grande Boucle en 1997) et sur de nombreuses classiques. Après l’annonce de sa retraite sportive en 2007, il est resté dans le monde cycliste en endossant naturellement le rôle de directeur sportif, une fonction qu’il mène avec passion.
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