À une époque où les populations de suidés n’ont jamais été aussi denses, au grand dam du monde agricole et des instances cynégétiques, le vieux solitaire semble avoir paradoxalement disparu de nos terroirs. Comment est-il devenu gibier d’exception, et quelles sont nos chances réelles de le croiser ?
Texte et photos : Sacha Herrero
Puissance, force et courage
LA CHASSE DE MÉLÉAGRE ET D’ATLANTE D’APRÈS PIERRE PAUL RUBENS (ENV. 1620)
Solitaire ou… « solitaire » ?
Vieux solitaire, un mythe ?
Un déclin expliqué
Plusieurs facteurs sont susceptibles d’expliquer la raréfaction des vieux solitaires, à commencer sans nul doute par la pression de chasse, et cet acharnement à vouloir tuer de « gros » spécimens. La disparition progressive du petit gibier sédentaire, et l’explosion démographique des grands animaux, ont conduit nombre de nos compatriotes à raccrocher le fusil au profit de la carabine. Pour beaucoup, la bête noire est devenue le gibier par excellence.
En résulte une pression de chasse croissante de l’espèce, tant pour réduire l’impact sur le monde agricole, que pour fidéliser des actionnaires en quête d’un tableau toujours plus quantitatif…Des battues qui s’intensifient, et qui ne sont que très rarement accompagnées de consignes de tir favorables à la sauvegarde des plus vieux sujets, comme nous l’évoquerons un peu plus loin.
A cette sur-chasse, il convient d’ajouter la modernisation incontestable du matériel. La précision des armes, la qualité des optiques et la performance des munitions sont autant d’éléments qui permettent au chasseur contemporain de réaliser avec succès des tirs lointains et dans des conditions de luminosité parfois réduite. Révolu, le temps où nous chargions nos fusils à canons lisses d’une cartouche de chevrotines ou d’une Brenneke, n’autorisant que des tirs à courte distance et d’une précision parfois hasardeuse. Dernier constat, l’amélioration constante de l’adresse des tireurs qui s’explique, certes par l’utilisation d’accessoires plus performants, mais aussi par une pratique de plus en plus assidue, tant sur le terrain que sur des stands d’entrainement.
Où le trouver en France ?
La réponse est simple, le sanglier ne pourra vieillir qu’en évitant les lieux de chasse. Aussi rares soient-ils, quelques sanctuaires existent encore, où nos suidés pourront trouver cette tranquillité nécessaire à leur maturité. A commencer par les zones de haute montagne difficilement accessibles aux véhicules, et de plus en plus délaissées par une population de chasseurs dont la moyenne d’âge ne cesse de croître.
Les immenses roselières comme la Camargue, peu hospitalières à la présence humaine, sont, de la même façon, des refuges susceptibles d’abriter quelques vieux solitaires. Tout comme les grandes réserves et les parcs nationaux, où la chasse est de fait proscrite. Pour autant, doté de facultés d’adaptation hors-pair, Sus scrofa semble désormais coloniser de nouveaux types d’habitat qui pourraient lui laisser l’éventuelle opportunité de vieillir : bordures autoroutières, zones industrielles ou encore périphéries d’agglomérations qui, pour d’évidentes raisons de sécurité, ne sont pas chassées, exception faite de rares battues administratives. A titre d’exemple, ce 4ème record national, qui fut prélevé par hasard par deux chasseurs de lapins le long d’un grillage d’autoroute.
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Aussi rare que fantomatique
DE TELLES DÉFENSES SONT DE VÉRITABLES RASOIRS. GARE !
Quelques signes distinctifs viennent pourtant caractériser le vieux solitaire, dont notamment la taille des grès et défenses qui retroussent de façon visible les lèvres supérieurs.
Quid de l’étranger ?
Si les chances de prélever un grand sanglier en France relèvent du hasard, qu’en est-il hors de nos frontières ? Il est courant de dire que plus on va vers l’est, plus on optimise ses chances de prélever un grand trophée de sanglier. La Bulgarie, la Roumanie ou encore la Hongrie furent un temps des destinations phares abritant des spécimens d’exception. Même si ces zones offrent aujourd’hui encore quelques belles opportunités, force est de constater que la pression de chasse y a fait, là aussi, peu à peu son œuvre. Restent toutefois des pays, comme la Turquie, l’Iran et le Tadjikistan où les chances de croiser un vieux solitaire, digne de ce nom, sont bien réelles, et ce malgré des populations moindres. D’aucuns prétendront qu’il s’agit de la sous-espèce Attila, dotée d’une morphologie plus importante, et par conséquent de maxillaires plus imposants. Pour autant, ce sont surtout les contraintes culturelles et religieuses qui en limitant la chasse, voire en l’interdisant aux populations indigènes, permettent aux sangliers d’atteindre leur maturité et de porter des trophées dignes de leur rang.
Pour voir le bout du tunnel…
D’avis de spécialiste, la pyramide des âges du sanglier s’est effondrée au fil du temps, pour devenir trop large à sa base et plus assez étoffée à son sommet. Pour expliquer un tel déclin, François Magnien met en avant des consignes inappropriées qui préconisent trop souvent le tir des animaux de moins de 50 kg, tous sexes confondus, et celui des mâles de plus de 80 kg. L’identification au saut de l’allée s’apparentant pour beaucoup à une loterie, de nombreuses laies adultes pâtissent de telles instructions. Or, n’oublions pas que ce sont elles qui assurent le système matriarcal de la compagnie. De la même façon, François Magnien déconseille le tir des mâles adultes qui, selon lui, sont essentiels pour la transmission du patrimoine génétique. En conclusion, l’espoir de voir vieillir nos sangliers résiderait dans le fait d’épargner un maximum de spécimens adultes, et de concentrer plus de 80% des tirs sur des sujets ne dépassant pas le poids vif de 60/65 kg (masse désormais souvent atteinte dès l’âge d’un an).
Une telle politique de prélèvement aurait aussi pour incidence de réduire sensiblement les dégâts agricoles, dus pour grande part à ces jeunes sujets, qui plus est dépourvus de laie meneuse.
L’identification au saut de l’allée
Quel âge a-t-il ?
Bien malin qui peut déterminer avec précision l’âge d’un vieux solitaire au premier regard. Aussi, par prudence, parlerons-nous ici de simple estimation. Nous n’évoquerons pas la pesée du cristallin, pas plus que les coupes dans le cément d’une dent, techniques de laboratoire éprouvées, mais qui ne sont, ni l’une ni l’autre, à la portée du chasseur lambda. S’il on sait d’expérience qu’un sanglier porteur de défenses et de grès de même longueur est âgé d’environ 30 mois, cette estimation devient beaucoup plus aléatoire au-delà de 3 ans.
Le chasseur dispose néanmoins de plusieurs outils, tous liés à l’examen post-mortem de la dentition, et qui peuvent lui permettre de présumer de l’âge approximatif du sujet récolté. A commencer par l’observation des molaires. D’ordinaire, entre 3 et 4 ans, seuls les mamelons de la première molaire M1 (voir photo) sont usés. Plus tard, entre 5 et 7 ans, il est courant d’observer une usure conséquente des premières (M1) et secondes molaires (M2), tandis que les cupsides de M3 et des incisives commencent à présenter une légère érosion. Au-delà de 8 ans, toutes les molaires ont fortement diminué et des traces significatives d’usure sont présentes sur les prémolaires (P2, P3, P4). Plus simplement, certains prétendent que la longueur en cm de la table d’usure des défenses correspond plus ou moins à l’âge de l’animal. A cette dernière méthode, nous préfèrerons toutefois évoquer la loi dite de Brandt qui calcule le rapport entre le diamètre de la base des défenses et celui mesuré au niveau de la table d’usure (voir encadré).
Coter, pourquoi et comment ?
Qu’il s’agisse du sanglier, ou de tout autre espèce, la cotation des trophées ne doit pas être considérée comme une fin en soi. Acteurs majeurs de l’équilibre population/milieu, les chasseurs ont en effet la responsabilité de raisonner leurs prélèvements, non pas sur la seule qualité des trophées, mais en priorité sur la quantité d’animaux récoltés, en tenant compte du sexe et des différentes tranches d’âge. Cependant, dès lors qu’un trophée le mérite, le recours à sa cotation se veut un outil indispensable, car permettant de suivre, dans le temps, l’évolution qualitative d’un cheptel. En France, cette cotation officielle est totalement gratuite, et peut être demandée auprès d’un expert de l’Association Française de Mensurations des Trophées (AFMT), soit à l’occasion d’une exposition cynégétique, soit dans le cadre d’une démarche particulière ; la liste des cotateurs étant consultable sur le site de l’Association Nationale des Chasseurs de Grand Gibier (www.ancgg.org). Il revient alors au détenteur du trophée de renseigner l’année d’obtention de celui-ci, le territoire du prélèvement, et d’en préciser le mode de récolte (tir, vènerie, trouvé mort…). A noter que l’AFMT précise dans sa chartre qu’elle peut coter, pour qui le souhaite, les trophées d’animaux prélevés en enclos, mais que ceux-ci ne pourront, en aucun cas, faire l’objet d’une homologation, ni d’une inscription au catalogue.
Côté terminologie (encadré 1)
Contrairement à d’autres espèces sauvages, la bête noire dispose d’un glossaire, on ne peut plus riche, dès lors qu’il s’agit de qualifier son âge. La classification la plus couramment retenue étant celle-ci :
* de 0 à 6 mois Marcassin
* de 6 à 12 mois Bête rousse
* de 1 à 2 ans Bête de compagnie
* de 2 à 3 ans Ragot
* de 3 à 4 ans Tiers-an
* de 4 à 5 ans Quartanier
* de 5 à 6 ans Vieux solitaire
* 6 ans et plus Grand vieux solitaire
Ne pas confondre âge et poids (encadré 2)
Il n’est pas rare d’entendre les chasseurs qualifier de grand sanglier, tout suidé dépassant le seuil mythique du quintal. Or, il convient d’admettre que le poids n’a désormais qu’une corrélation lointaine avec la maturité du sujet. Le régime omnivore de Sus scrofa, ses facultés d’adaptation aux différents milieux, l’augmentation des surfaces cultivées – notamment de maïs – l’abondance de la fructification forestière due à l’absence d’hiver rigoureux, ou encore le nourrissage excessif sont autant de facteurs qui profitent d’un point de vue pondéral à l’espèce. Aussi, n’est-il pas rare de récolter de nos jours des spécimens de 100, voire 120 kg, alors qu’ils sont tout au plus âgés de 24 à 30 mois.
La méthode de Brandt (encadré 3)
La croissance des défenses s’accompagne d’un allongement de la table d’aiguisage et, par conséquent, d’une augmentation du diamètre à la base de celle-ci (dT). A contrario, le diamètre de la racine (dB) reste de son côté quasiment invariant. On peut par conséquent, de façon assez grossière, estimer l’âge d’un sanglier mâle en se référant au tableau ci-dessous. En résumé, moins la conicité de la défense est importante, plus l’animal est âgé.
Quid de la méthode de cotation ? (encadré 4)
A noter qu’il existe, de par le monde, plusieurs méthodes de cotation, Sci, Rowland Ward ou encore Cic. Dans l’Hexagone, l’AFMT retient cette dernière qui prend en compte les longueurs et largeurs des défenses ainsi que la circonférence des grès (voir fiche de cotation). De ces mesures, découle un certain nombre de points permettant ensuite d’établir un classement national. Bien que l’AFMT n’attribue pas officiellement de médaille pour l’espèce sanglier, les différents niveaux s’établissent, à simple titre informatif, comme suit :
* à partir de 105 points Seuil d’homologation
* de 110 à 114,9 points Bronze
* de 115 à 119,9 points Argent
* 120 points et plus Or
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