La campagne Harris-Walz tente de séduire les chasseurs américains, mais à priori, ils partent de trop loin.
Une élection américaine décisive sous haute tension
À l’approche des élections présidentielles américaines de novembre 2024, le paysage politique est plus polarisé que jamais. Kamala Harris, actuelle vice-présidente des États-Unis, se présente comme candidate à la présidence, succédant à Joe Biden. Son colistier est Tim Walz, gouverneur du Minnesota. En face, Donald Trump, qui reste une figure emblématique du Parti républicain, capitalise sur une base électorale solide et particulièrement active. Pour le duo démocrate, l’enjeu est immense : reconquérir les électeurs de l’Amérique rurale, notamment les chasseurs et pêcheurs, qui ont souvent fait défaut à leur camp ces dernières années.
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Pour bien comprendre, il faut se rappeler que les États-Unis ne fonctionnent pas sur un système électoral direct. Les présidents sont élus par un collège électoral où chaque État a un certain poids, basé sur sa population. Les États dits « swing states » ou « États pivots » sont essentiels, car leurs électeurs peuvent faire basculer l’élection d’un côté ou de l’autre. C’est dans ces États, souvent très ruraux, que la communauté des chasseurs et pêcheurs joue un rôle clé. La chasse, loin d’être un simple passe-temps, est un pilier de la culture rurale américaine, et toucher cet électorat pourrait être décisif pour Harris et Walz.
Un effort désespéré pour reconquérir le monde rural
C’est dans cette optique que la campagne Harris-Walz a récemment lancé un groupe nommé « Hunters and Anglers for Harris-Walz » (Chasseurs et pêcheurs pour Harris-Walz), une coalition destinée à attirer les chasseurs et pêcheurs américains. Leur but ? Mobiliser ces électeurs traditionnellement réticents face aux politiques démocrates, souvent perçues comme trop urbaines et déconnectées des réalités rurales (si ça vous rappelle quelque chose, c’est normal).
Mais dès l’annonce de cette coalition, les critiques se sont abattues. Comme l’a ironisé un chasseur du Maryland : « Les chasseurs veulent soutenir Harris-Walz autant que le gibier veut être mangé. » Cette phrase pleine de sarcasme résume parfaitement le ressenti d’une large partie de la communauté des chasseurs, qui voit d’un mauvais œil cette tentative tardive de séduction politique.
En effet, Harris et Walz ne sont pas considérés comme des défenseurs des intérêts cynégétiques. Depuis le début de l’administration Biden-Harris, plusieurs mesures ont été prises qui ont irrité les chasseurs et les pêcheurs. Parmi elles, la fermeture de millions d’hectares de terres publiques aux activités de chasse en Alaska, ou encore l’interdiction des munitions en plomb dans certaines réserves naturelles, perçue comme une attaque contre leurs pratiques traditionnelles.
Tim Walz, chasseur maladroit ou politique rusé ?
Tim Walz, gouverneur du Minnesota et colistier de Harris, se présente pourtant comme un chasseur expérimenté. Lors de l’ouverture de la saison de chasse au faisan dans son État, il a voulu jouer la carte de la proximité avec la communauté des chasseurs. Mais l’événement, censé symboliser son lien avec le monde rural, s’est transformé en une farce nationale. Des vidéos publiées sur les réseaux sociaux montrent Walz et ses compagnons de chasse traversant les champs… sans fusil à la main. « Il prétend aller à la chasse au faisan sans arme », s’est moquée Sara Gonzalez, une présentatrice sur BlazeTV.
Un peu plus tard, Walz a bien été vu avec un fusil, mais cela n’a pas suffi à redresser la barre. Pire encore, une vidéo le montre peinant à charger son fusil Beretta et expliquant qu’il a choisi ce modèle pour éviter les douleurs à l’épaule causées par le recul. Un chasseur du Maryland s’est empressé de commenter : « Enlève-lui ça avant qu’il tire comme Dick Cheney », en référence à l’ancien vice-président qui avait accidentellement blessé un compagnon de chasse en 2006.
Des politiques « anti-chasse » et un rejet de la communauté rurale
Cette campagne est perçue par beaucoup comme une manœuvre électorale de dernière minute pour tenter de reconquérir un électorat que les Démocrates ont négligé pendant des années. Gabriella Hoffman, directrice du Center for Energy and Conservation, a raillé la campagne en ces termes : « Aucun chasseur ne sera convaincu par une casquette camouflage à 40 dollars que Harris-Walz les représente vraiment. »
Les critiques à l’encontre de l’administration Biden-Harris sont nombreuses. Lawrence Keane, vice-président de la National Shooting Sports Foundation, a accusé l’administration d’avoir une politique « anti-gun » et « anti-hunting », citant des décisions comme l’interdiction des munitions en plomb dans les réserves naturelles nationales. Cette mesure, selon lui, nuit aux chasseurs sans apporter de preuve scientifique solide que ces munitions ont un impact négatif sur la faune.
Derek Wolfe, ancien joueur de football américain et animateur du podcast Wolfe Untamed, est encore plus catégorique : « Les chasseurs voteront pour quelqu’un qui met l’Amérique en premier, et pour moi, c’est Donald Trump. » Ce sentiment est partagé par beaucoup de chasseurs qui voient en Trump un défenseur de leurs droits, en particulier en ce qui concerne les armes à feu et l’accès aux terres publiques.
Une fracture croissante entre les Démocrates et le monde rural
Depuis l’élection de George W. Bush en 2000, le Parti démocrate a progressivement perdu le soutien des électeurs ruraux. Cette perte s’explique par des politiques perçues comme trop progressistes, souvent en décalage avec les réalités des petites villes et des zones rurales. Le duo Harris-Walz tente maintenant de rattraper son retard avec une campagne ciblée sur les chasseurs et pêcheurs, mais le temps presse, et cette coalition semble arriver bien trop tard pour faire une réelle différence.
En réalité, cette nouvelle initiative est vue par beaucoup comme une tentative désespérée d’un parti qui a négligé cet électorat pendant des années. Comme l’a résumé un chasseur des Grandes Plaines : « C’est la saison où le gars débarque avec son camo de marque, étiquette encore accrochée, ne sachant même pas de quel côté va la cartouche. Oui, ils ont l’air un peu ridicules, mais au moins on ne leur prend pas leurs droits. Contrairement aux Démocrates. »
Un coup de fusil dans l’eau ?
Au final, cette campagne Harris-Walz, bien qu’ambitieuse, semble vouée à l’échec. Les chasseurs et pêcheurs, qui représentent une base électorale importante dans de nombreux États clés, ne semblent pas prêts à se laisser séduire par des casquettes camouflage et des promesses de dernière minute. Les politiques de contrôle des armes et les restrictions sur la chasse menées par l’administration Biden-Harris ont creusé un fossé trop large entre les Démocrates et le monde rural.
À quelques semaines de l’élection, il semble que cette coalition « Hunters and Anglers for Harris-Walz » ne fera pas le poids face à un électorat fermement enraciné dans ses traditions. Pour Harris et Walz, la reconquête du vote rural semble être une tâche bien plus ardue que prévu.
Sources : https://thespectator.com/politics/hunters-laugh-the-harris-walz-campaign-vote/
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Harris étant la Sandrine Rousseau démocrate : effectivement ça va être dur de convaincre les chasseurs, les Red Necks et autres ruraux…
Je me demande si l’urbanisme à outrance n’a pas déshumanisé les rapports sociologiques qui unissaient les couches diverses des populations en France comme aux « Amériques ». La ruralité est en train de céder devant les coups de boutoirs des dieux Euros et Dollars et après moi le déluge.