La chasse est, au-delà d’une pratique, une symbolique de la juste place du vivant.
Texte : Alice Laville
Ce cheminement j’ai dû le faire, justement parce que je ne viens pas d’une famille de chasseur. J’ai dû faire un effort de conceptualisation pour transformer cette pratique inconnue et à priori peu acceptable, en une évidence. Ce qu’elle est pour moi aujourd’hui (J’expliquerai ça une autre fois peut-être).
Il eut été plus facile de m’en imprégner progressivement, au contact d’un père ou d’un grand-père admiré. Mais là encore, double difficulté : je suis une femme, féministe, et j’en ai marre d’avoir comme représentation des héros masculins (merci Disney).
Voilà donc deux raisons, deux difficultés, qui font de moi une « non-chasseresse » : ce n’est pas mon milieu traditionnel, mon habitus, et ce n’est pas une pratique généralement associée à mon genre ; je n’ai pas de modèle donc je n’y suis pas naturellement encouragée.
Il me semble que ça peut largement suffire pour ne jamais devenir chasseresse.
Sur Insta, j’ai écouté ce matin une influenceuse expliquer pourquoi elle chassait. Bingo ! Famille passionnée de cynégétique, et re-Bingo, il a fallu qu’elle négocie son droit à pratiquer le ball-trap parce que fille ! Elle a dû lutter contre l’ordre établi pour y arriver.
Alors imaginez une femme, non issue du milieu, sensibilisée aux idées sur la domination systémique patriarcale : il peut lui sembler hautement suspecte une activité exercée quasi-exclusivement par des hommes. C’est le raccourci que font allégrement Sandrine Rousseau mais aussi toutes les invitées des plateaux de Victoire Tuaillon ou Lauren Bastide, journalistes féministes créatrices de podcast très écoutées par la jeunesse, surtout féminine : Chasse = virilité = domination patriarcale. Alors qu’un tout autre récit peut s’écrire : Chasse = compréhension des équilibres = contemplation de la beauté du monde … par exemple.
Donc voilà, J’AI fait un effort pour m’y intéresser, et un effort pour la comprendre (et pour en avoir fait tout le tour, l’avoir poussée dans ses retranchements, aucun paradoxe à l’horizon, elle n’a rien à cacher). Reste encore le passage à la pratique… Pour l’instant, impossible (pour des raisons émotionnelles, mais aussi pour des raisons pratico-pratiques du genre « que faire de la dépouille ? ». Je ne sais pas vider, ni dépecer… Bref encore des freins,) mais rien d’insurmontable si j’étais… accompagnée…
Pour que la chasse soit comprise et pratiquée, il me semble que c’est aussi à vous de faire des efforts. Ce week-end au Game Fair j’ai entendu un chasseur dire que lui, il n’expliquait pas la chasse, qu’elle était inexplicable, qu’il fallait s’y intéresser, et que c’est aux non-chasseurs de poser les bonnes questions : FAUX !!! Mais tellement faux ! On ne fait pas avancer sa cause en attendant sagement que la vérité éclate !
Personne ne fait d’effort sans objectif. Le vôtre est évident : la promotion et l’explication de la chasse. Sans cette main tendue, l’opinion publique se chargera de faire disparaitre ce qui n’est, ni compris ni transmis. Moi j’ai fait l’effort pour ne pas rester en dissonance cognitive : tombée amoureuse d’un chasseur, soit j’épousais la chasse soit je jetais le chasseur. Bah oui, rares sont ceux qui décortiquent leurs croyances s’ils n’y sont pas poussés. Mon égo aurait aimé que j’emprunte le chemin toute seule, mais non, c’est pas comme ça que ça marche, il faut l’acter.
Aujourd’hui j’aime la chasse, non seulement par analyse transcendantale purement rationnelle mais aussi spirituellement… et mon instinct me dit que les chasseurs devraient pousser les chasseresses en ambassadrices pour mener aussi le combat.
Pour moi la chasse est donc face à deux grands écueils : Elle s’inscrit dans une transmission quasi-exclusivement familiale et ne sait pas, ou peu, sortir de ces frontières là ; et même en son sein, les femmes doivent redoubler d’efforts pour s’y sentir légitimes.
J’ai des idées (il en faut quand on n’a pas de pétrole comme disait VGE) mais ce sera l’occasion d’un autre article.
Sais pas… je ne suis pas convaincu que le filtre que vous apportez au débat soit le meilleur.
En préambule -et au mépris de la langue- j’ai toujours dit « une chasseuse », car hormis Diane je n’ai jamais entendu dire d’une femme qu’elle était « chasseresse », mais c’est un détail.
Coller l’hégémonie patriarcale au milieu de la problématique de la chasse me parait curieux. Je pense qu’il serait plus judicieux de l’envisager d’après le mode de vie et surtout le lieu de vie.
Là j’aimerais rouvrir le vieil antagonisme rural/citadin, ou urbain. Il me semble plus adéquat que le sempiternel féminisme qui finit par nous faire trembler de passer pour un lourdaud.
De ce que j’en vois (et oui, je suis chasseur) les femmes sont toujours bien accueillies, ni favorisées ni moquées. Elles ont la même place que les hommes, même si elles ne la prendraient pas spontanément.
Mieux encore, vous tirez souvent mieux que les hommes, car plus appliquées et moins fanfaronnes. Y compris à la cible, car je suis aussi tireur sportif 😉
Ceci dit vous avez éminemment raison lorsque vous prônez un rôle de communication accru pour les femmes, vous parlez bien mieux que nous.
« Chasse = compréhension des équilibres = contemplation de la beauté du monde … »
Merci de l’énoncer ainsi, je garde la formule.
Je vous remercie de votre article.
Désolé de vous contredire mais « Chasseresse » est le terme employé par toutes et tous depuis des lustres.
Très bel article, appréciable a lire tant dans les propos que la façon dont vous abordez le sujet.
J’émets un petit bémol dans l’acceptation des femmes par les chasseurs. Elles ont tout a fait leur place et sont surtout très bien acceptées (la plupart du temps, les sexistes ont les changera pas mais ils sont peu nombreux…).
Bonsoir, je tiens à préciser que nous ne sommes pas toujours bien accepté, pourquoi ? Très bonne question… Je n’en sais rien pour le moment mais j’ai eu malheureusement de très mauvaises relations avec des chasseurs masculins… Des réflexions du genre » pourquoi tu n’as pas tiré »… , des moqueries très mal placées, dans plusieurs chasses. Donc non nous ne sommes pas toujours bien vues! Je l’ai plus remarqué quand je faisais partie de la chasse (ACCA pour ma part) que quand j’étais invitée., sachant que j’ai aussi pris des responsabilités dans certaines de ses associations, du temps, et que cela à parfois été très difficile…
A bon entendeur, salut.
Bien entendu que les femmes ont une place dans le monde cynégétique, comme leurs collègues masculins.
Il faut partager ce qu’est la chasse, peut-être avec parfois des propos brouillons, avec un peu d’habitude on s’en sort plutôt bien.
Parler d’une passion en ayant les yeux qui brillent, pétillent, et votre auditoire prendra la passion en pleine volée.
Devenir chasseur(eresse) sans être baigner dedans bravo, bravo et merci à ceux qui vous ont accompagné(e) et encouragé(e).
Bonsoir Madame,
Vos propos me font échos. j’ai 55 ans, à 50 ans je n’étais pas chasseur, ma merveilleuse Braque acquise en 2018 m’a initié à la chasse.
Depuis je vis des instant de bonheurs insoupçonnés, de partages avec dame nature comme je ne l’avais jamais imaginé auparavant, alors que je suis un « sur-mulot » des champs.
Je côtoie nombre de personnes dans mon entourage pro et perso, je défends cette philosophie, ce rôle de premier écologiste, de régulateur qu’est le chasseur pour le bien être de la faune et la flore.
Contrairement ce que je m’imaginais les gens, même ceux qui sont contre, sont beaucoup ouverts qu’on ne le pense sur les échanges et les discussions du pourquoi la chasse et comment elle se pratique.
La féminisation de la chasse, comme celle des métiers du bâtiment, elle est nécessaire et vitale…
Les confrontations d’idées, de points de vues, de différences, enrichissent et construisent notre avenir à tous.
Merci et bravo pour cette parution, elle vous honore.
Je viens de lire, et je me dit qu’avec l’association #ChassePartage nous avons visée juste.
Mon cher Richard pouvez vous dire à l’auteur de ce texte que nous serions heureux de partager avec elle notre passion.
Bel article Madame LAVILLE et merci Richard de nous le faire partager. Point n’est besoin d’être tombé dedans quand on était petit comme Obélix, la Chasse c’est dans les gênes. De mon point de vue, c’est comme le dessin, la musique, la danse….certains d’entre nous ont ça dans le sang et développent leur « aptitude » en grandissant et avec le temps en apprenant de l’expérience des autres. Je pense que si on n’a pas cette apétence naturelle, à moins de faire une rencontre comme vous, il n’y a aucune raison de pratiquer la Chasse.
Je mettrais un bémol à votre discour féministe sur le patriarcat, car nous sommes tous les fruits de nos ascendants et héritons de leurs pratiques (culturelles, éducatives, culinaires, religieuses…) qu’eux mêmes avaient hérités et transmis. À l’échelle Humaine, il n’y a pas si longtemps, c’était les hommes qui partaient chasser pendant que les femmes s’occupaient de la cuiellette et de tout ce qui touche au foyer, nous ne sommes que leurs descendants… Bien évidemment nous avons évolué et progressé (parfois pas assez c’est vrai) en ce qui concerne la place des Femmes dans notre société, mais avec 46 permis de chasse derrière moi (je m’y suis mis seul à 16 ans sans modèles autour de moi…) j’ai toujours constaté que les Femmes étaient plutôt bien acceuilli en tant que chasseresse et faisaient même des envieux qui regrettaient que leurs femmes ne le fussent pas !
A vous lire.
La chasse est un mot féminin divinisé dés l’antiquité à travers les déesses qu’elles soient grecque ou romaine…. Artémis ou Diane en furent les représentantes symboliques et armées.
La femme a toute sa place au sein de la chasse a parfaite égalité avec l’homme.
Chapeau bas pour l’écriture et vous avez toute votre place dans le monde de la chasse en tant que femme.
J’espère vous lire à nouveau.