À l’heure où l’on peine à réguler les populations de cerfs, de chevreuils et surtout de sangliers qui ravagent les cultures, provoquent des collisions et menacent l’équilibre même des forêts, une poignée d’illuminés nous vend le retour du bison comme l’avenir de l’écologie.
C’est Nice Matin qui raconte – Mercredi, dix bisons d’Europe ont été solennellement embarqués depuis la réserve des Monts d’Azur pour aller « réensauvager » 8.000 hectares au Portugal. L’opération, réalisée dans le silence, la concentration et une quasi-mystique druidique, est présentée comme la « première étape du grand réensauvagement européen ». Rien que ça. Demain, ce seront des chevaux de Przewalski.
L’humain occidental repu poursuit son rêve de réensauvagement…en espadrilles de coton bio.
Le vocabulaire employé dit tout : « la forêt respire », « la lumière revient », « l’herbe pousse », « l’écosystème devient résilient »… On croirait un podcast d’astrologie sauvage. On nous jure que le bison, par son seul passage, soigne la nature, éloigne les incendies, équilibre les espèces et, pourquoi pas, remettra les glaciers à leur place.
Mais pendant que les écologistes poétiques relâchent des bisons dans des enclos géants pour « réenchanter le vivant », les gestionnaires de territoires, eux, comptent les dégâts. En France, les dégâts agricoles dus aux ongulés explosent. Les chasseurs se battent au quotidien pour tenter de contenir une faune qui prolifère en raison des activités humaines… tout en étant critiqués pour leur action. On nous somme de réguler les populations ici pendant qu’on les relâche ailleurs dans un élan mystico-politique. Cherchez l’erreur.
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L’écologie de laboratoire, idéalisée depuis un salon ou un fond de subvention européenne, n’a que peu de rapport avec la réalité des territoires. Réintroduire des grands herbivores, c’est poser les bases d’un problème que d’autres, demain, devront régler à leur place – à coup de tirs de régulation, évidemment diabolisés. On connaît la chanson.
Il y a une phrase que l’on entend souvent en matière de gestion de la nature : « laisser faire ». C’est séduisant, sur le papier. Mais dans un monde aussi transformé que le nôtre, laisser faire revient souvent à laisser pourrir. La nature n’est pas un décor figé, c’est un équilibre fragile, dynamique, complexe. Et cet équilibre demande du discernement, pas des contes pour enfants dans lesquels le bison serait le nouveau Messie des forêts.
À défaut de lucidité, on a de la mise en scène. On filme des camions, on parle de « résilience », on cite l’accord de Montréal à la COP15 pour habiller l’affaire d’un vernis géopolitique. Mais tout cela ressemble moins à un projet écologique qu’à un rite de purification : si nous avons tant détruit, alors il faut faire pénitence, relâcher le sauvage, supplier les bisons de nous absoudre.
Les gens sérieux, eux, savent que la nature ne pardonne pas. Elle s’adapte, elle déborde, elle envahit, elle bouscule. À force de vouloir la fantasmer, on finit par la trahir.
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Excellent ! 👏et 🙏
Ils nous diront que les loups réguleront la population de bisons , mais entre un troupeau de moutons parqué derrière des clôtures et un bison bien cornus de 800kgs vivant en groupe le choix sera vite fait .
Après les vautours , les ours , les loups maintenant les bisons . Après qu’est-ce-que ce sera , le rhinocéros laineux ?