L’indien, un cerf pas si « emblématique »

Chasse Actu
date 29 novembre 2024
author Thomas Drach

« L’Indien », cerf abattu en forêt de Compiègne : symbole ou emballement émotionnel ? Retour sur les faits et les enjeux cynégétiques.

Image d’illustration

Navré de briser le récit comme ça, de but en blanc, mais non, ce cerf n’était ni un « cerf emblématique », ni « un symbole », encore moins « le cerf le plus célèbre de la forêt de Compiègne ». « L’Indien », c’est juste un beau cerf dix-cors de la forêt de Laigue. (La plus petite forêt juste un peu plus au nord sur la carte, de l’autre côté de l’Aisne.) Il se trouve que quelques photographes, qui ont pu le suivre et l’immortaliser depuis un certain temps, lui avaient, semble-t-il, donné un petit nom.

Je peux les comprendre. J’ai fait pareil avec un cerf qui brame sous mes fenêtres depuis trois saisons maintenant (Je vous l’accorde, Bernard, ça a moins de gueule que « l’Indien », mais bon). Mais pour l’Indien comme pour Bernard, tout cela n’est pas de nature à leur donner un statut particulier, une importance ou une immunité spécifique, par rapport à, par exemple, leurs frères du même âge et de la même ramure.

La clé de voûte de la gestion des populations des grands ongulés en général, et des cerfs en particulier, en France, c’est ce qu’on appelle le plan de chasse. Des quotas maximum ET minimum pour chaque espèce, ventilés entre sexes et classes d’âge, fixés dans chaque département par une commission (la CDCFS) de toutes les parties prenantes sous l’égide du préfet, avec le concours de l’OFB, sur la base des bilans des années précédentes et des éventuels comptages. Les chasseurs, à tir comme à courre, ont l’obligation de respecter la quote-part du plan de chasse qui leur est attribuée.

À l’échelle nationale, le plan de chasse est un outil redoutablement efficace, et les populations de cervidés se portent très bien. Pour vous donner un ordre de grandeur, pour l’espèce cerf élaphe, le plan de chasse annuel, c’est presque 100 000 animaux, soit près de 400 par jour de chasse en France. « L’Indien » n’est qu’un cerf parmi les 400 prélevés ce jour-là.

Une polémique émotionnelle plutôt qu’un débat rationnel

Localement, les discussions dans ces commissions peuvent aboutir à de mauvais choix : quotas trop élevés à répétition ou, au contraire, insuffisants pour une bonne gestion. Chaque partie prenante a des objectifs divergents. En caricaturant un peu : les forestiers et les agriculteurs en veulent le moins possible, les associations de nature en veulent le plus possible, et les chasseurs se trouvent quelque part entre les deux.

Il est totalement légitime de se demander si, par exemple, en Laigue, le plan de chasse a du sens ou non. Mais si on veut creuser ce sujet sérieusement, il faut s’adresser notamment aux gens qui siègent dans cette fameuse commission. En commençant par l’OFB, peut-être. Et surtout, aborder le sujet de façon rationnelle, pas par la lorgnette d’une histoire taillée pour l’émotion et qui n’a pas de prise concrète dans le réel.

Stan et son collectif « Abolissons la Vènerie Aujourd’hui », interviewé ici, n’est PAS partie prenante à ces discussions. Dans cette histoire, il n’est qu’un militant anti-vènerie, qui ne connaît strictement rien à la gestion des équilibres agro-sylvo-cynégétiques et qui globalement s’en moque (il serait bien incapable de reconnaître « l’Indien » si vous lui mettiez 10 photos de cerfs sous le nez). Mais il ne manque jamais une occasion de raconter une histoire si elle peut nuire à la vènerie, peu importe si elle est fondée.

A lire aussi : Stan Broniszewski ou la haine des « François-Louis »

Et il faut reconnaître qu’il aurait tort de se priver, puisque la stratégie donne du fruit : « l’Indien » a droit à sa pastille sur une télévision nationale. Stan rajoute d’ailleurs :

« Dans la chasse à courre, y a aucune limite, que ce soit sur la méthode, le temps de traque, le but à la fin, c’est d’avoir un beau trophée pour sa cheminée. »

Je crois qu’il est difficile de dire autant de choses fausses sur la vènerie en une seule phrase. La chasse à courre est au contraire une pratique fortement encadrée par la loi, très codifiée, dotée de sa propre éthique, et soumise au plan de chasse au même titre que les autres modes de chasse. De plus, ce n’est pas DU TOUT un mode de chasse dont l’objectif est le trophée. Bien au contraire, à la chasse à courre, ce sont les chiens qui choisissent en premier lieu l’animal de chasse.

Sans trop rentrer dans les détails, le rôle des veneurs, de ce point de vue, se borne essentiellement à s’assurer que le choix des chiens soit compatible avec les exigences du plan de chasse. Au résultat, sur une saison de chasse, on prend des cerfs de tous les âges : du daguet jusqu’au vieux dix-cors qui ravale, en passant par tous les âges intermédiaires.

Revenir aux faits

Bref, vous êtes toujours libre de détester la chasse en général, la chasse à courre en particulier, mais ne croyez pas tout ce qu’on raconte sur le sujet.

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9 Commentaires :
  1. GUILLAUME MARKUS
    29/11/24

    BFMTV a considéré ce sujet d’un vieux cerf comme une importante information à traiter avec un reportage où ils n’ont pas manqué d’envoyer une équipe avec caméra pour avoir encore le même Stan Broniszewski d’AVA et où ils ont eu pour conclusion que certains pays d’Europe proches avaient interdit la chasse à courre.

    L’information est largement orientée anti-chasse et anti-chasse à courre en particulier et participe à l’inculture en matière de sélection animale naturelle.

    Concernant les hommes, la France limite l’âge des donneurs de sperme à 45 ans pour les PMA. Il s’agit dans ce cas de sélection volontaire pour la reproduction humaine.

    1. MARKK
      30/11/24

      Donc, ce n’est pas une grande perte que la mort de ‘’L’Indien’’, ce vieux cerf.

      Il y aura pour féconder le troupeau de femelles un beau cerf en pleine fleur de l’âge qui se sera battu pour prendre la place du mâle dominant et qui pourra transmettre des meilleurs gènes.

  2. serge
    29/11/24

    Donner un nom à un animal l’humanise mais ce n’est pas suffisant, il reste un cerf et n’est l’emblème du coin que par la volonté de quelque passionnés qui voient en ce bel animal une merveille de la nature. Cependant le nombre de cervidés reste un problème et à moins de les stériliser par une méthode qui reste à définir la chasse est un moyen connu ancestral et culturel. Mettons en avant également l’urbanisation galopante qui parcellise les massifs forestiers et est en partie responsable de la présence de grands animaux dans les cités. Je n’ai pas de solution j’ai des doutes et des craintes mais j’aimerai en discourir calmement sans haine ni insulte.

  3. Vallier
    29/11/24

    Le nombre d’humain reste un problème aussi, il faudrait les stériliser ou abattre les plus vieux, si on suit la logique des chasseurs.

    1. Jean
      01/12/24

      Il est évident que nous sommes trop nombreux(un milliard de plus en dix ans,population mondiale en 1800)donc améliorer la contraception dans certaines parties du globe paraît évident.

  4. Bruckner daniel
    29/11/24

    C’est devenu une mode depuis que la chasse photos c’est développée. Pourquoi ne pas donner de nom à une biche, difficile à suivre, non. Je rencontre de plus en plus de gugusses, souvent mal équipés ayant la science infuse qui dérangent mais qui sont contre la chasse au brâme.

  5. Voué Pascaline
    30/11/24

    Il faut interdire la chasse à courre….

  6. Voué Pascaline
    30/11/24

    Tuons tout ce qui est vieux alors,,,réguler mon oeil !c’est cruel et n’a aucun sens aujourd’hui.

  7. Jean
    01/12/24

    D un côté,130 accidents journaliers sur les routes,500 collisions annuelles avec des trains,degats agricoles,sur la végétation,ect.synonyme d une grosse facture et de l autre des gens qui ne veulent pas de chasseurs,,pas facile.

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