Loup : Annie Genevard choisit son camp

Chasse Actu
date 05 mai 2025
author Léa Massey

Annie Genevard le dit sans détour : entre le loup et les éleveurs, elle a choisi. Un signal fort après des années d’ambiguïté.

« Se protéger du loup est extrêmement compliqué » : cette phrase, lâchée dans un entretien au JDD ce 4 mai par la ministre de l’Agriculture, Annie Genevard, n’est pas une simple constatation technique. C’est un aveu politique, un cri d’alarme et, peut-être, le début d’un tournant attendu depuis des années par les éleveurs des zones de montagne.

Car la parole publique, jusque-là embarrassée, parfois déconnectée, prend enfin un accent de réalité. En déclarant « entre les éleveurs et le loup, j’ai choisi mon camp », Genevard s’attaque à l’une des dernières zones d’hypocrisie écologique de notre époque : celle qui sacralise une nature fantasmée au détriment des hommes et femmes qui la font vivre.

Depuis des années, le loup est devenu un fétiche idéologique. Une espèce totem pour les ONG environnementalistes, un levier de mobilisation pour les activistes animalistes, un symbole de la « nature sauvage » qu’il faudrait préserver à tout prix – même si le prix en question est payé par des éleveurs à bout, psychologiquement broyés, économiquement étranglés, surveillés comme des délinquants. On connaissait le harcèlement militant, voici venu le temps du traquenard photographique : Genevard le confirme, certaines associations n’hésitent pas à poser des pièges autour des exploitations après une attaque, pour surveiller les gestes désespérés d’éleveurs que l’État n’a pas su protéger.

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Ce que la ministre décrit dans cette interview, c’est une forme de guerre asymétrique. D’un côté, des agriculteurs enracinés, modestes, légalistes, sommés de prouver qu’ils ont « tout tenté » pour protéger leur troupeau avant d’avoir le droit de tirer. De l’autre, des prédateurs de plus en plus présents (1 013 loups recensés officiellement en 2024, un chiffre que beaucoup jugent sous-estimé), une prédation croissante, et un cadre juridique hérité d’une époque où le loup était menacé – ce qu’il n’est plus.

Car voilà le cœur du sujet : le loup n’est plus une espèce en danger. Il est désormais présent dans plus de 80 départements, parfois là où on ne l’avait jamais vu. L’Europe commence enfin à ouvrir les yeux. La France a obtenu, fin 2024, le déclassement du loup dans la convention de Berne, et espère un déclassement prochain dans la directive Habitats. Cette avancée juridique, saluée par Genevard, pourrait ouvrir la voie à une régulation réelle, à l’image de la Suisse, qui n’hésite plus à éliminer les individus dangereux avant qu’ils ne causent des ravages.

Mais soyons lucides : ce combat est loin d’être gagné. Chaque avancée administrative est contestée. Chaque tir autorisé est attaqué en justice. La doctrine de « protection stricte » s’est muée en corset bureaucratique, que les préfets eux-mêmes peinent à desserrer. D’où l’importance du nouvel arrêté signé par Genevard et la ministre de la Transition écologique, qui vise à mieux sécuriser juridiquement les décisions préfectorales.

Ce n’est pas un virage radical, mais c’est un pas courageux. Et c’est un pas politique. En nommant à l’Agriculture une ministre issue du Haut-Doubs, dont le territoire est en première ligne, le gouvernement a peut-être envoyé un signal clair. Il n’est plus possible d’abandonner éleveurs au nom d’une écologie abstraite, punitive et désincarnée.

Ceux qui dénoncent aujourd’hui l’augmentation du plafond de tirs autorisés (192 loups en 2025), ou la révision des critères de protection des troupeaux, devraient commencer par passer une nuit auprès d’un éleveur dont le cheptel a été décimé. Qu’ils regardent dans les yeux ceux qui enterrent leurs bêtes, épuisés, en larmes, seuls au petit matin avec leur fusil… et leur impuissance.

Annie Genevard n’a pas tout réglé, loin de là. Mais elle a parlé vrai. Et c’est déjà une victoire.

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6 Commentaires :
  1. Marc
    05/05/25

    Si notre nouvelle ministre de l’agriculture est sincère et ne fait pas de politique politicienne , alors peu-être que nous avancerons doucement .

  2. Ajh
    06/05/25

    Pour qu’un politicien ne fasse pas de politique politicienne il faut qu’il ait d’autres compétences ( J’espère que c’est son cas) et donc qu’il n’en ait rien à faire de perdre son poste ou son mandat . Mais ils sont peu nombreux ds ce cas .

  3. serge
    06/05/25

    Et si c’était vrai ?

  4. serge
    06/05/25

    Et si c’était vrai ? non

  5. jean walter
    06/05/25

    Et si on parlait des loups hybrides que certains exotiques voulaient faire entrer dans la convention de Berne pour avoir encore plus de problème …
    Et si on parlait des variations de comptage variant de 1 à 5 voir plus entre les laboratoires Forgen et Antagène qui grâce à la génétique deviennent de plus en plus pointu…
    Et si on parlait des 12 000 moutons tués chaque année que le contribuable doit payer pour dédommager l’éleveur mais pas par les pro loups qui ne se bousculent pas pour financer leur folie…
    Et si on parlait des protections miracles qui ne sont que des mirages idéologiques….
    Et si on parlait des pseudos scientifiques naturaliste qui essaient à longueur de journée de faire croire qu’il n’y a pas de problème avec les loups …

  6. Parlais
    07/05/25

    Est-ce qu’ils font aussi des cérémonies épuisés et en larme quand les bêtes partent à l’abattoir ? Franchement c’est de l’hypocrisie, il y a plus de chèvres qui meurent de causes naturelles (accidents inhérents au pastoralisme, etc) que tuées par les loups. Et pourtant aucun d’entre eux ne remet en cause le pastoralisme… Je comprends leur sentiment d’impuissance et leur colère, mais franchement c’est hypocrite.

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