Venaison : une viande d’avenir

Chasse Actu
date 19 février 2025
author Léa Massey

Depuis quelques décennies, les populations d’ongulés sauvages en France connaissent une véritable explosion démographique. Chevreuils, sangliers, cerfs… Leur présence s’intensifie dans nos paysages, soulevant autant de défis pour les agriculteurs que d’opportunités pour les chasseurs. 

Mais au-delà des questions de gestion cynégétique, une interrogation mérite d’être posée : et si la prolifération des ongulés ouvrait la voie à une nouvelle forme d’auto-suffisance alimentaire en France ?

Un gibier omniprésent, mais sous-exploité

Jamais les ongulés sauvages n’ont été aussi nombreux dans nos campagnes. Sangliers, chevreuils, cerfs… Leur présence s’est intensifiée au fil des décennies, portée par le réchauffement climatique et des changements profonds dans l’aménagement du territoire et les pratiques agricoles : autant de facteurs qui ont favorisé leur essor.

Pourtant, cette abondance ne se reflète pas dans les assiettes. Malgré des prélèvements massifs chaque année, la viande de gibier demeure un produit peu consommé, souvent perçu comme réservé aux grandes occasions ou difficile d’accès hors des réseaux spécialisés. Une ressource naturelle largement disponible, mais encore sous-exploitée.

L’exemple inspirant des Abénakis

Loin des clichés d’une chasse exclusivement récréative, certaines initiatives à travers le monde démontrent que l’exploitation durable des ressources cynégétiques peut être un véritable levier d’indépendance alimentaire. C’est le cas des Abénakis d’Odanak et de Wôlinak, une communauté autochtone du Canada, qui a récemment lancé un programme de formation en boucherie pour valoriser la viande issue de la chasse.

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Face à la raréfaction des bouchers dans leurs villages et à la montée des prix de la transformation, ils ont pris une décision radicale : apprendre à découper eux-mêmes leur gibier pour assurer l’autonomie alimentaire de la communauté. Un savoir-faire ancestral remis au goût du jour, qui leur permet de transformer et de redistribuer les viandes issues de leur chasse, réduisant ainsi leur dépendance aux circuits classiques de distribution alimentaire.

Un modèle transposable en France ?

En France, la question de la valorisation du gibier reste marginale dans le débat public. Pourtant, les chasseurs disposent déjà d’un accès privilégié à cette ressource durable et locale. Mais plusieurs freins existent :

  • Un cadre réglementaire restrictif : La commercialisation du gibier nécessite un passage par un atelier agréé, ce qui limite la diffusion directe.
  • Un manque de formation : Transformer du gibier ne s’improvise pas. Au final, peu de chasseurs maîtrisent les techniques de boucherie nécessaires pour optimiser la découpe et la conservation de la viande.
  • Un déficit de communication : L’image du gibier souffre encore d’une perception élitiste ou rustique, loin des tendances actuelles du “manger local” et du circuit court.

Pourtant, la dynamique pourrait évoluer. À l’heure où de plus en plus de Français cherchent à se réapproprier leur alimentation, le gibier représente une alternative écologique, saine et parfaitement en phase avec les préoccupations contemporaines. Il est riche en protéines, pauvre en graisses et…bio.

Et si la chasse devenait une réponse aux défis alimentaires de demain ?

Face à la pression exercée sur l’élevage intensif et aux crises qui fragilisent notre souveraineté alimentaire, l’exploitation raisonnée des ressources naturelles pourrait bien être une solution d’avenir. Loin d’être un retour en arrière, ce modèle s’inscrirait dans une logique moderne et durable, en phase avec une gestion équilibrée de la faune.

La formation de chasseurs-bouchers, à l’image de l’initiative abénaquise, pourrait ouvrir de nouvelles perspectives : et si chaque territoire rural disposait de son atelier de transformation de gibier ? De la venaison distribuée aux cantines scolaires aux coopératives locales spécialisées, les pistes sont nombreuses pour intégrer le gibier dans une nouvelle approche d’auto-suffisance alimentaire.

Finalement, la question n’est pas tant de savoir si ce modèle est viable, mais plutôt quand et comment la France osera franchir le pas. Car après tout, quoi de plus logique que de se nourrir des ressources que la nature nous offre en abondance ?

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3 Commentaires :
  1. François Wachbar
    19/02/25

    Bravo 👏
    Super article.
    Ayant appris à valoriser la venaison de mes chasses, je ne consomme pratiquement plus que cette viande de grands gibier sous toutes les formes.

  2. Loïc
    20/02/25

    Je suis responsable d’une chasse qui réalise un plan de chasse de 150 têtes. Je consomme du gibier personnellement, je vends une majorité des prélèvements via l’app Artémis gibier (vente aux restaurants et atelier de transformation) et je fais plaisir à quelques particuliers via Gibier pour Tous. Et vous ?

    1. N
      20/02/25

      Je suis chasseresse depuis plus de 10 ans et nos chasses se sont multipliés par 2. On ne voulait pas vendre car trop compliqué et justement notre boucher nous a fait passer par Artémis pour éviter les complications ! L’utilisez-vous depuis longtemps ? Nos premières ventes ont été niquel !

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